PREVENS : Unir l’initiative étudiante et l’expérience vécue pour prévenir le suicide chez les adolescentes par Rebecca Savard et Camille Lavoie
Pour beaucoup, le monde de la recherche semble un univers distant, presque inaccessible. En tant qu’étudiante à la maîtrise en sciences infirmières, j’ai moi-même ressenti cette impression d’isolement jusqu’à mon retour aux études. C’est en replongeant dans le monde universitaire et ces multiples possibilités que j’ai découvert ce qu’implique réellement la recherche scientifique, un domaine plus varié que je ne l’imaginais.
Ce qui est souvent méconnu de la population, c’est qu’il existe plusieurs façons de faire de la recherche. Dans le cas du projet PREVENS, nous adoptons une approche appelée recherche-action participative. Cette méthode se distingue par l’implication active de tous les acteurs concernés, incluant les adolescentes, leurs parents, s’il y a lieu d’être, et les intervenants du milieu. L’objectif est simple : travailler ensemble pour co-construire des solutions concrètes et adaptées aux besoins des jeunes en milieu rural.
Les défis financiers de la Recherche
Pour mener à bien un projet de cette ampleur, les chercheurs et étudiants en recherche doivent souvent relever de nombreux défis, dont le financement. Au Québec, le Fonds de Recherche du Québec (FRQ) est l’un des principaux organismes de soutien pour des initiatives en lien avec des enjeux sociaux importants. Cette année, Le fonds de recherche en santé, le fonds de recherche Société et culture ainsi que le Ministère de la Santé et des Services sociaux ont lancé un appel de propositions de projets de recherche en prévention du suicide* Action concertée thématique, allouant un budget de plus de 1 300 000 $ pour financer plusieurs projets. C’était une occasion que notre équipe ne pouvait pas manquer.
La professeure Nathalie Maltais, de l’UQAR et fondatrice du projet ARRIVE, a donc réuni une équipe de chercheurs et de partenaires pour développer un projet en optant pour la prévention du suicide chez les adolescentes de 14 à 19 ans. Le projet PREVENS consiste à explorer et développer avec les adolescentes et les adultes concernées les meilleures stratégies en prévention du suicide pour les adolescentes de cette tranche d’âge vivant en milieux ruraux.
Une recherche qui inclut l’expérience vécue
L’un des aspects les plus uniques du projet PREVENS est l’implication de Camille, une jeune femme experte avec expérience vécue. Vivant avec un trouble de santé mentale, Camille est déterminée à partager son parcours pour inspirer et aider les adolescentes qui pourraient traverser des défis similaires. En nous parlant des obstacles et des défis qu’elle a rencontrés, elle nous aide à identifier les pistes d’amélioration et les actions concrètes que nous pouvons proposer pour éviter ces difficultés aux jeunes de demain.Camille est une source précieuse d’inspiration et de connaissances, et elle contribue pleinement comme co-chercheuse à enrichir notre étude par son vécu, ses idées et son engagement sincère envers la cause.
La recherche-action participative : Un processus collaboratif
Un projet de recherche-action comme PREVENS ne se construit pas seul. Ce type de recherche demande une grande collaboration entre chercheurs, expert.e.s de l’expérience vécue, participants, et experts du milieu. Les étapes incluent la co-construction des objectifs, la collecte de données en partenariat avec les participantes, et la mise en place d’actions concrètes basées sur les résultats obtenus.
En tant que coordonnatrice de ce projet, cette expérience m’apprend chaque jour sur les étapes de planification, de demande de financement, et de gestion de projet. J’ai aussi appris que la recherche peut être un outil puissant pour transformer la société, mais elle doit être inclusive et en phase avec les besoins des personnes qu’elle vise à aider.
L’importance de la recherche-action participative
Ce type de recherche nous invite à adopter une vision plus humble et équitable de la recherche. Plutôt que de reposer sur une hiérarchie traditionnelle où les chercheurs détiennent une forme d’autorité, la recherche-action participative valorise l’expertise de chacun, qu’il s’agisse des chercheurs, des experts de l’expérience vécue, des partenaires ou des intervenants. Cette approche renforce l’idée que toutes les voix sont importantes et contribuent au succès du projet.
Comme l’indiquent Loignon et al. (2022), de nombreux scientifiques s’accordent désormais sur l’importance de promouvoir l’équité en santé en intégrant les personnes directement concernées par les obstacles individuels et structurels. En fait, qui de mieux placé que celui qui vit avec la problématique pour savoir ce qu’il ou elle désire. En impliquant activement ces personnes, on développe une compréhension plus fine et nuancée de leurs besoins et de leurs réalités.
Les approches de recherche non participatives, bien qu’utiles, se révèlent souvent insuffisantes pour saisir, du point de vue des premiers concernés, les leviers d’action pour des interventions en santé porteuses d’équité. Elles limitent aussi la participation des personnes concernées dans l’élaboration des politiques et des programmes qui les touchent, alors que cette inclusion devient aujourd’hui essentielle dans les domaines de la santé et des services sociaux.
En terminant, Camille et moi allons vous raconter les péripéties de notre aventure dans le monde de la recherche-action participative car nous aurons deux billets par mois sur le Blogue d’ARRIVE.
Rebecca Savard étudiante à la maitrise en sciences infirmières et auxiliaire de recherche à l’UQAR et Camille Lavoie experte du vécu
RÉFÉRENCE
Loignon, C., Godrie, B., Dupéré, S., & Gervais, L. (2022). Recherches participatives et équité en santé. Presses de l’niversité de Laval.